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Orioxy / Album: Tales

Les six morceaux qui composent l'album nous plongent dans un univers singulier, entre chant et poème.

die Deutche Übersetzung ist leider nicht verfügbar

Orioxy est un quartette suisse et "Tales" est le titre de leur premier album. 

Un album... étrangement beau. Une beauté qui fait fi des canons. Une beauté qui dérange presque. "Tales" est un disque particulier que j'hésite même parfois à écouter. Je ne sais pas pourquoi car, lorsque les premières notes résonnent, je suis fasciné, captivé, soumis presque. Je ne peux plus décrocher. Et c'est sans doute pour cela que j'hésite. Pendant les petites quarante minutes que durent l'écoute, le temps semble s'arrêter. 

Difficiles à cerner, les influences hésitent entre la pop - façon Lisa Gerrard ou Talk Talk - le jazz, la folk-song et la musique celte ou indienne. C'est à la fois onirique et cauchemardesque et le groupe semble s'amuser avec nos fantasmes inconscients ou nos peurs d'enfant. C'est une étrange sensation qui nous envahit. 

Orioxy, c'est d'abord la voix étonnante de la chanteuse Israélienne Yael Miller qui trouve un écho dans le jeu brillant et évocateur de la harpiste Julie Campiche. À elles deux, elles ont écrit tous les morceaux de cet album envoûtant. Une chanteuse, une harpiste, auxquelles il faut ajouter un contrebassiste (Manu Hagmann) et un batteur (Nelson Schaer), voilà un quartette à la configuration plutôt originale, avouez-le. Et avec eux, le mot "acoustique" prend vraiment tout son sens. On y sent le bois, le souffle, les peaux, les cordes... Tout est équilibre et subtilité et chaque ambiance se construit sur des rythmes fragiles. 

Yael Miller joue autant qu'elle ne chante. Elle est capable de moduler sa voix avec grâce… mais avec rage aussi. Et quand elle ne chante pas (sur "Zaïna" ou "Silent Memory" par exemple), elle continue à donner de l'âme et de l'esprit à la musique. Par sa respiration, par sa présence, par ses murmures. Aussi étonnante est la façon dont Julie Campiche utilise la harpe. Ne cherchez pas ici les clichés féeriques. Son jeu est sec et intense. Ses attaques, comme ses solos, sont découpés, ciselés, sculptés. Jamais elle ne démontre, toujours elle évoque. Avec autant de poésie que de lucidité. 

À la batterie, Nelson Schaer, discret mais tellement indispensable, distille un jeu félin, doux et parfois redoutable. La contrebasse, profonde et chaude, accompagne et rassure le groupe sur ce chemin incertain et mystérieux… et soudain se liquéfie lorsque Manu Hagmann utilise l'archet. C'est comme si l'on tombait alors dans un abîme sans fin ("Tell Me Lies"). 

Cet album est magnétique. Avec Orioxy, on va de surprise en surprise sans jamais s'en rendre compte. On ne sait jamais où l'on pose le pied quand, tout à coup, la musique se dérobe, se cache... et se révèle à nouveau. Ce quartette est décidément malin, presque machiavélique. Et "Tales" porte vraiment bien son nom. 

Ecoutez-le. Mais, méfiez-vous, l'accoutumance vous guette. 


Jacques Prouvost
Jazzques / 23. Jan. 2011

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