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Orioxy / album: Tales

image © Thomas Perrodin
 
Tales
album 2010

C’est un univers fascinant à l’ambiance singulière que nous propose cette jeune formation Hélvète. 

Les six histoires qui nous sont contées dans cet album dégagent quelque chose de particulier, un climat qui les rend proches du songe. 
La prise de son, effectuée au plus près des instruments, met en valeur les lignes épurées et envoûtantes développées par les quatre membres du quartet. 

La voix chaude et joliment timbrée de Yael Miller est exploitée sur plusieurs registres. Tous les titres n’étant pas pourvus de paroles, elle sait, au-delà de l’interprétation d’un texte, exprimer sa musicalité en chantant des notes, ou participer à l’effort rythmique en plaçant avec sobriété des notes pour doubler la ligne de Contrebasse, la soutenir avant de s’envoler sur un très beau thème (« Zaïna », avec le soutient vocal de Julie Campiche). Les textes qu’elle interprète, écrits en Hébreu ou en Anglais, sont mis en forme avec beaucoup d’originalité et servis par un phrasé subtil, révélant une science du placement maîtrisée. Le spectre des émotions qui habitent son chant est large: voix fragile d’une petite danseuse de porcelaine aux yeux humides dans la petite boîte à musique de « Silent Memory », folie rageuse sur « Lost Feet » ou lente montée en puissance sur le magnifique "Tell me lies". 

L’utilisation d’une Harpe reste assez anecdotique en Jazz. Isabelle Olivier nous avait enchanté avec, entre autres, son « Quintet Océan ». Julie Campiche amène ici sa propre approche de l’instrument, en combinant astucieusement les possibilités d’accompagnement et d’expression de divers instruments à cordes (Piano, Guitare, Kora…), avec une sonorité céleste et une économie de moyens qui ne fait que mettre en lumière la créativité dont elle fait preuve. Ses solos sont dénués de toute esbroufe et s’inscrivent discrètement dans la logique rythmique et harmonique des morceaux. La Harpe colore en outre le son d’ensemble du Quartet de teintes pastel qui contribuent à créer une ambiance unique. 

La discrétion et l’intelligence dont elle fait preuve trouvent un écho dans le jeu épuré et magnifique d’une section rythmique de haute tenue. Manu Hagmann et Nelson Schaer accompagnent avec souplesse la Chanteuse et la Harpiste. Les lignes de contrebasse sont profondes et chaloupées, toujours d’une pureté essentielle. On notera également la très belle sonorité de Manu Hagmann, en pizzicato comme à l’archet (superbe travail sur l’intro de « Tell me lies »). Nelson Schaer assure, par son drumming minimaliste, un soutient pulsatif toujours suffisant, jamais débordant, et empreint d’une grande sensibilité.  

Les quatre musiciens, par un travail sur la profondeur du son et du propos, donnent à leur premier album un charme indéniable. Leurs « Tales » sont à découvrir d’urgence, car la beauté et la fraîcheur qui en émanent font de cet album inattendu une très belle surprise.


Olivier Acosta
www.mozaic-jazz.com / oct. 2010

www.manusound.net